Accident de décompression

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Conséquences

7/ Symptômes


La rapidité de mise en oeuvre du traitement médical est la première condition de sa réussite : il existe un "délai de grâce" de 30 min (Sciarli) durant lequel l'accident, doit normalement régresser, s'il est correctement traité au caisson hyperbare. Savoir reconnaître rapidement les symptômes de l'accident de décompression et de la maladie de décompression est vital : une 1/2 heure perdue vous rapproche dangereusement du fauteuil roulant... ou du cercueil.

Les symptômes dépendent de l'endroit où les bulles se sont formées, et des tissus qu'elles ont lésés. Selon ces tissus, les symptômes peuvent être très divers et en particulier les symptômes peuvent être complètement atypiques.


7.1/ Symptômes principaux


Nous allons pouvoir trouver les signes suivants :

Symptômes généraux

  • Fatigue intense sans rapport avec les efforts réels (asthénie).
  • Signe d'une décompression anormale, c'est souvent le premier symptôme de la maladie de décompression, il peut être suivi d'aggravation de l'état de l'accidenté (bullage en cascade).


  • Perte de connaissance.
  • Peut être passagère, ou incomplète, voire se limiter à un "trou noir" de quelques fractions de seconde.

  • Angoisses, troubles de l'humeur

  • Détresse cardio-ventilatoire plus ou moins marquée (de la simple pâleur au coma). Conséquence de l'hypovolhémie, de l'action des médiateurs chimiques et de l'embolie pulmonaire.

  • Hypoxie (paleur, faiblesse).

  • Selon leurs ampleurs ces signes peuvent annoncer ou pas un accident plus grave. Dans tous les cas ils devront amener à une recherche d'autres symptômes et à la mise en route "à tout hasard" du traitement palliatif des accidents de plongée.


    Symptômes pulmonaires

  • Troubles de la ventilation.
  • Dus à l'embolisation de la circulation pulmonaire et à la bronchioconstriction sous l'action des médiateurs chimiques. Ils peuvent se traduire en gêne respiratoire, douleur, toux. Si ces troubles sont suffisamment intenses pour être ressentis comme gênant par le plongeur, on parle de "chokes" (étouffement en anglais), ils annoncent presque toujours un accident de décompression grave.


    Symptômes neurologiques

  • Pertes de sensibilité, paralysies, picotements : signes d'atteinte neurologique médullaire (moelle épinière) ou cérébrale.

  • Troubles sphinctériens (rétention d'urine) : atteinte médullaire touchant le système neuro-végétatif.

  • Convulsions, signe d'une atteinte cérébrale.

  • Ces symptômes peuvent s'établir de façon progressive et sournoise. En général ils progressent des extrémités vers le centre : picotement au bout du pied, puis au mollet, puis toute la jambe.

    Il peuvent également être asymètrique, un seul côté touché, la perte de sensibilité peut être incomplète (perte de la sensibilité à la chaleur, mais conservation de la sensibilité de contact...).

    En fait les symptômes peuvent prendre de formes très diverses et le diagnostic précoce de l'accident de décompression qui s'installe n'est pas forcément évident.


    Symptômes vestibulaires

  • Problème d'équilibre, problème d'audition (surdité ou bruit sans réalité), nystagmus (battement spontané des globes oculaires): signes d'atteinte de l'oreille interne.

  • Symptômes musculaires

    * Douleurs articulaires (lésions des tendons : bends).

    Attention, si la présence de symptômes clairement identifiés confirme l'accident de décompression, l'absence d'une partie d'entre eux ne permet pas d'éliminer la possibilité d'accident de décompression.


    Très fréquemment l'accident de décompression peut être difficile à diagnostiquer, ses symptômes peuvent être masqués ou mélangés à d'autres troubles. Par exemple la fatigue ressentie par un plongeur est elle due à la fête de la veille (ou au voyage en car),à la longue nage de retour au bateau ou est elle vraiment due à un accident de décompression ? Une perte de sensibilité aux bout des pieds est-elle due au froid ?

    Le diagnostic est d'autant moins facile que dans ces 2 cas, les causes éventuelles que nous avons citées (fatigue, effort et froid) sont aussi des facteurs favorisants de l'accident de décompression.


    7.2/ Une erreur classique : les puces et les moutons


    Ces symptômes ont été décrits par Haldane dans ses travaux en 1908. Depuis tous les cours de plongées et tous les moniteurs les redécrivent obstinément. Pratiquement aucun moniteur ne les a jamais vus, et pour cause : les puces et les moutons sont caractéristiques des accidents de décompression en milieux secs. Haldane qui étudiait des ouvriers tubistes qui travaillaient, au sec, 10 h dans un tube de Trigger ou sur le front de taille d'un tunnel passant sous une rivière en a vu, lui. On en voit aussi lors des plongée en tourelle et caisson, plus rarement en vétement sec.

    Lors des plongées en milieu sec, deux facteurs se combinent pour favoriser les accidents de décompression cutanés : le cycle thermique du caisson qui provoque une vasodilatation à la descente et un vasoconstriction à la montée (l'atmosphère chauffe à la compression et se refroidit à la décompression), et le gaz au contact de la peau qui favorise la dissolution transcutanée.


    Par contre en vêtement humide la vasoconstriction cutanée est quasi immédiate (surtout en eau froide) et il n'y a pas de gaz au contact de la peau. On ne voit, pour ainsi dire, jamais de puces ou de moutons en plongée sportive en vêtement humide.


    Voir la répétition d'une erreur, par recopie d'un livre sur l'autre depuis pas loin d'un demi siècle (on plonge quand même en vêtement humide depuis la 2ème guerre mondiale...), cela pourrait être amusant si cela ne se traduisait pas par des erreurs et des retards dans le lancement du traitement médical.

    En effet au niveau des plongeurs le message passe souvent selon l'une des formes suivantes complètement erronées et dangereuses :

  • Les puces et les moutons sont un symptôme caractéristique de l'accident de décompression, donc si il n'y a ni puces ni moutons, il n'y a pas d'accident de décompression !

  • Les puces et moutons sont des incidents bénins qui provoquent des picotement et des démangeaisons. Le plongeur confond donc les picotements et petites douleurs dus à une atteinte médullaire grave, avec un accident bénin !

  • Ces deux erreurs graves retardent l'évacuation jusqu'à l'apparition des symptômes lourds (paralysies, rétention d'urine ...).

    A titre anecdotique, signalons le cas d'un moniteur ayant eu un moutons à l'épaule suite à une séance d'école "sévère" en fosse de Charenton (profondeur : 15 m température de l'eau : 29°C. Pas vraiment des conditions marines). Notons qu'en général, quand ils apparaissent les accidents cutanés atteignent le haut du corps (tronc menbres supérieurs) et qu'ils sont souvent associés à une pression sur la peau (ici sans doute due à la bretelle du bloc). Des "puces" aux jambes c'est en réalité un accident médullaire qui s'installe.


    7.3/ Levé de doute, recherche d'autres symptômes, petits signes


    Etant donné cette difficulté de diagnostic, au moindre signe suspect il faudra essayer de vérifier la possibilité d'un accident de décompression : recherche de symptômes plus subtils, dépouillement du profil de plongée, interrogatoire du plongeur et de ses camarades, recherche de facteurs

    favorisants...

    Certains symptômes sont transitoires : ils ont disparu mais à l'interrogatoire le plongeur peut s'en souvenir. Un interrogatoire bien conduit permet de lever les doutes, de déclencher une évacuation dans des délais brefs et augmente les chances de récupération.


    Dans ce chapitre nous allons classer les accidents de décompression et leurs symptômes en fonction des zones lésées. Cela n'a pas pour but de permettre au plongeur de faire un diagnostic différentiel (sans intérêt car de toute façon le traitement "sur le pont" est le même), mais simplement de permettre de raccrocher ces symptômes à des mécanismes logiques et de les mémoriser plus facilement.


    Accidents neurologiques

    La paralysie s'installe parfois de manière brutale, parfois de manière sournoise, parfois pas du tout, l'accident de décompression en restant à des troubles sensititifs.


    On retrouve pourtant, souvent, les signes suivants :

  • Douleur lombaire (ou au sternum, ou à la poitrine). C'est une douleur brève, brutale en "coup de poignard" (comparaison très utile pour décrire cette sensation, nous avons tous reçu de nombreux coups de poignards et nous nous en souvenons très bien ...). Cette douleur est souvent mal comprise : confusion avec un mal de dos classique, un faux mouvement... Souvent, elle ne sera mentionnée que si la question est posée.

  • Rétention d'urine. Présente dans 80 % des cas, c'est souvent le premier symptôme correctement interprété.

  • Les paresthésies. Ce sont des sensations sans causes réelles : picotements, grattements, douleurs plus ou moins vives... Leurs localisations obéissent à la même logique que les paralysies : les deux jambes (correspond à la paraplégie), un coté du corps (hémiplégie, voir plutôt les accidents cérébraux), ou tout le corps (tétraplégie). La symétrie peut quand même être incomplète.
  • Elles peuvent passer inaperçues ou être mal interprétées (confusion avec les puces qui rappelons-le, n'existent pas en vêtement humide).
    Des paresthésies aux deux jambes ou sur une moitié du corps sont pourtant le signe quasi certain d'un accident de décompression.

  • Troubles de la sensibilité. Perte de la sensibilité superficielle : le sujet ne ressent pas une piqûre mais sent une pression qui se transmet en profondeur dans la chair. Perte de la sensibilité profonde (ne ressent plus la pression précédente), insensibilité à la chaleur. Ces troubles peuvent n'être ressentis que tardivement (masqués par le froid), ou n'être pas perçus.

  • Troubles des réflexes, signe de Babinski, réflexes anormalement vifs (hyperéflexivité), ou au contraire inexistants.

  • Accident de l'oreille interne

    Le problème est souvent de les distinguer du bête "mal de mer". Il y a des jours où si on envoyait au caisson tous les plongeurs présentant des nausées et des problèmes d'équilibre on se fâcherait rapidement avec tous les centres hyperbares de France. Pour lever le doute on recherchera les signes suivants :


  • Difficultés d'audition (hypoacousie) et bruits sans causes (acouphènes). Ils ne peuvent pas exister pour un simple mal de mer.

  • Une sensation de vertige transitoire est souvent ressentie à la remontée ou au palier.

  • Le battement des globes oculaires (nystagmus) est caractéristique de l'accident de décompression. Il peut ne pas apparaître quand les yeux sont ouverts (contrôle grâce à l'information visuelle), mais devenir sensible paupières baissées. On peut alors le sentir en posant le bout des doigts sur les paupières.

  • Attention, si ces symptômes sont des signes certains d'accident de décompression ou de barotraumatismes, leur absence ne permet pas d'éliminer la possibilité d'un accident.


    Le problème du diagnostic différentiel de l'accident de décompression et du barotraumatisme de l'oreille interne concerne les médecins, pas les plongeurs. Pour nous le traitement est le même et dans les deux cas il faut évacuer vers un centre hyperbare.



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